mercredi 31 janvier 2018

J'irai cracher sur vos tombes - Boris Vian



Si vous le lisez avec l'espoir de trouver dans J'irai cracher sur vos tombes quelque chose capable de mettre vos sens en feu, vous allez drôlement être déçu.
Si vous le lisez pour y retrouver la petite musique de Vian, vous l'y trouverez. Il n'y a pas beaucoup d'écrits de Vian dont il ne suffise de lire trois lignes anonymes pour dire tout de suite : " Tiens, c'est du Vian ! " Ils ne sont pas nombreux, les écrivains dont on puisse en dire autant. Ce sont généralement ces écrivains-là qui ont les lecteurs les plus fidèles, les plus passionnés, parce que, en les lisant, on les entend parler.
Lire Vian, lire Léautaud, lire la correspondance de Flaubert, c'est vraiment être avec eux. Ils sont tout entiers dans ce qu'ils écrivent. Ça ne se pardonne pas, ça. Vian a été condamné. Flaubert a été condamné...



  
MON AVIS
Cette chronique est assez compliquée à écrire. Il est difficile d'avoir un avis objectif sur ce court roman. Boris Vian délivre une thématique dure et un roman cru. C'est violent et poignant à la fois. Quand je réfléchis aux sentiments que j'ai ressenti pendant la lecture de ce livre, j'ai du mal à les décrire. C'est tout un camaïeux d'émotions brutes et fortes. C'est brut et décadent. C'est aussi puissant et vrai. Mais trash également.

L'auteur reste entier dans l'écriture de ce livre. Rien n'est refusé, rien n'est caché: du sentiment le plus noble (s'il y en a) au sentiment le plus vil. J'ai ressenti de la gêne face au récit et aux personnages auxquels on a du mal à s'attacher ou à réellement comprendre. Le ton est souvent malsain, parfois provocateur mais toujours prenant. Une fois dedans, je n'ai pas pu décrocher.

On se demande où il veut en venir, et la réflexion suite à cette lecture perdure après la fin du roman. Je suis toujours en intense réflexion et bouleversée. Je ne sais pas sur quel pieds dansé: voir un livre et une lecture brillantissime ou complètement dérangée. L'un n'excluant pas l'autre.

L'histoire se déroule dans un contexte difficile, une Amérique rongée par ses problèmes raciaux et ségrégationnistes, ajoutant encore à la lourdeur ambiante et l'environnement pesant du roman. Avec du recul, j'ai eu l'impression de retrouver le ton gris de La Peste de Camus. Boris Vian sait poser son décor et nous y plonger. Il dépeint son univers avec avec une plume incisive, unique et fluide.

On suit également un personnage particulier, qui a une histoire très particulière et qui suit une vengeance toute personnelle. J'aurais aimé en savoir plus sur le personnage, sur son passé, ce qui l'a rendu tel qu'il est aujourd'hui. Les personnage sont à l'égal des thématiques: durs, violents, et dérangeants, particulièrement certaines scènes, et les sous-entendus les accompagnant.

Je comprends pourquoi ce roman a pu être condamné pour atteintes aux bonnes mœurs, qui a d'ailleurs été écrit sous le pseudonyme de Vernon Sullivan. Clairement ce livre ne laisse pas indifférent, qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas.

Je réitérerai mon propos en disant que j'ai réellement  été embarquée et en même temps profondément dérangée à certains moments. C'est aussi ce que l'on attend des livres que nous lisons.

Pour reprendre un commentaire laisser par un lecteur sur Livraddict : "Un de ces bouquins atrocement délicieux, et fabuleusement horrible, mais à ne certainement pas mettre entre toutes les mains." Taggy Warrior

Je suis certaine de pouvoir dire que je suis surprise par cette lecture, perturbée et également retournée. Par certains côtés, ce roman de Boris Vian fait preuve d'un réalisme dérangeant mais fascinant. Je pense pouvoir dire que j'ai dévoré ce roman, sans en apprécier la lecture. Il faut le lire pour se faire sa propre opinion d'un classique de la littérature. Il ne plaira certainement pas à tout le monde...


Le + : Un roman entier, qui ne fait pas dans la dentelle
Le - : Son côté malsain et dérangeant


MA NOTE

lundi 22 janvier 2018

Les Derniers Jours de Nos Pères - Joël Dicker




Londres, 1940. Soucieux de pallier l'anéantissement de l'armée britannique à Dunkerque, Winston Churchill a une idée qui va changer le cours de la guerre : créer une branche noire des services secrets, le Special Operation Executive (SOE), chargée de mener des actions de sabotage et de renseignement à l'intérieur des lignes ennemies et dont les membres seraient issus des populations locales pour être insoupçonnables. Du jamais vu jusqu'alors.
L'existence même du SOE a été longtemps tenue secrète. Soixante-cinq ans après les faits, Les Derniers Jours de nos pères est un des premiers romans à en évoquer la création et à revenir sur les véritables relations entre la Résistance et l'Angleterre de Churchill.





MON AVIS
Pour commencer, faisons simple : j’adore découvrir de nouveaux romans se déroulant durant la 2GM, de lire de nouvelles visions, points de vu et histoires concernant cette période du XXème siècle. Et ne pas oublier. Surtout ne jamais oublier. Voilà, les bases sont posées.

Je dois aussi avouer que le petit bandeau rouge indiquant un roman de Joël Dicker m’a effectivement interpellée. (Et ben oui, le marketing, ça fonctionne bien !)

Donc comme vous pouvez vous en douter, ce roman se passe au moment de la Seconde Guerre Mondiale, lors de l’invasion des Allemands en France jusqu’à sa libération et les diverses conséquences que celle-ci a pu avoir sur les protagonistes. L’action se déroule ici dans deux pays différents : la France et le Royaume-Uni.

L’auteur, dans son premier roman primé, pour lequel il a reçu le Prix des écrivains genevois en 2010, fait découvrir au lecteur, un service peu connu du grand public : le SOE, les Special Operations Executive, soit les services secrets britanniques qui ont entraîné des agents spéciaux de différentes nationalités pour qu'ils puissent infiltrer leur propre pays et lutter contre les envahisseurs allemands. Ici, on suit la section F, pour la section française de ces services secrets.

Intéressée par le sujet inhabituel, le lecteur suit le destin « brisé » de ces jeunes européens, français, britanniques d’origines françaises ou québécoises, qui se sont levés contre la tyrannie et l’injustice quand personne d’autre ne pouvait ou ne souhaitait se comporter comme des Hommes. Les conduisant parfois à commettre l’irréparable. Pour le plus grand bien. Ou pas.

Le terme « d’Homme » revient inlassablement tout au long du roman comme un film conducteur à cette fatalité de la guerre. Sommes-nous et serons-nous toujours des Hommes après ces atrocités ?

J’aime à croire qu’il y a un fond de vérité, et que ces personnages inconnus ou méconnus, résonnent avec la vie de ces gens réels qui ont vécu ces temps difficiles.

Les protagonistes principaux sont réels. Réels et vrais. Je ne sais comment le décrire autrement. Ils sont vrais dans leurs désillusions et leurs espoirs, leurs qualités et leurs défauts, leurs réussites et les échecs, leurs vertus et leurs pêchés.

Le plus dur, finalement dans ce roman, c’est de ne pouvoir être en colère contre aucun grand « méchant » de l’histoire. Nous ne pouvons blâmer que des Hommes qui sont devenus des hommes et des femmes, tout leur humanisme envolé.

Nous suivons très clairement l’histoire de cette section française du SOE, éclairée parfois par certains personnages Allemands : « les méchants ». (J'utilise le terme "méchant" à défaut d'en trouver un plus approprié et par simplicité.) Qui à cause de leur foi en leur patrie et en leurs dirigeants ont accompli les actions horribles que nous connaissons et qui nous révoltent aujourd'hui. Par lâcheté très souvent, et pour la plupart, rarement par plaisir.  

Joël Dicker rappelle un fait important à son lecteur que tous les Allemands n’étaient pas Nazis et ne prenaient pas plaisir dans les atrocités de guerre. Beaucoup d’enrôlés Allemands étaient aussi de jeunes hommes tout juste sortis de l’adolescence. Des adolescents faisant la guerre contre et à d’autres adolescents. La guerre, peu importe qui l’a fait, est toujours plus complexe que le simple manichéisme « bien » contre « mal ». Après tout, l’Histoire est toujours écrite par les vainqueurs, et pour gagner les vainqueurs n'agissent pas toujours justement non plus.

Le pire dans ce roman, c'est quand tu sens le drame venir. Tu le sens venir, inéluctablement et tu sais que cela va être un carnage, que ton petit cœur tout fragile aura du mal à s’en remettre. Mais tu sais aussi que cela doit arriver parce que c’est une fatalité. Parce qu'une guerre n'est pas un roman et ne doit pas être romancée pour lui donner une belle et héroïque apparence. Parce que dans le meilleur des mondes, il n’y aurait pas de drames et encore moins de guerres. Mais que ce meilleur des mondes n’existe pas et que le drame arrivera que tu le veuilles ou non. Et surtout, tu ne peux t’empêcher de continuer, parce que tu veux découvrir l’histoire extraordinaire de ces gens ordinaires, de ces gens, humains avant tout, comme toi et moi, qui n’ont rien demandé à personne et qui ont décidé de se battre pour ceux qui ne veulent ou ne peuvent le faire. De se battre pour ce qu'ils croient être juste et bien. Et je voulais continuer à découvrir cette si terrible, époustouflante et belle histoire.

Premier roman de Joël Dicker, je pense que vous l’aurez compris, je l’ai beaucoup aimé. Bien plus que La Vérité sur l'Affaire Harry Québert  ou La Famille des Baltimore (bien que ce soit des styles et des genres très différents, je n'ai pas été emportée de la même manière, avec la même intensité). J’aime toujours lire ces romans fondés sur cette partie de notre Histoire si dramatique et terrible. Parce qu’il ne faut jamais oublier d’où l'on vient et ce qu’il pourrait toujours arriver. Il peut être justement difficile d’écrire un roman sur quelque chose de si terrible que l’on n’a pas vécu ou même de l’appréhender correctement blotti au chaud chez soi, mais Joël Dicker nous sert un roman brillant, complexe et solide. La plume de l'auteur ici fait des merveilles pour retranscrire les émotions pures, brutes et contradictoires des protagonistes. Et je ne peux compter le nombre de fois où mon cœur a battu la chamade avec eux, où mon cerveau s'est demandé quelle décision prendre face à leur choix cornélien.


Le + : Le cadre historique, le style de l'auteur, l'histoire et les personnages
Le - : /


MA NOTE


Je vous partage quelques passages du roman. Juste pour la beauté du texte:


"Le courage, ce n'est pas de ne pas avoir peur : c'est d'avoir peur et de résister quand même."

"[...] l'indifférence ne se combat pas, ou alors difficilement. L'indifférence est la raison même pour laquelle nous ne pourrons jamais dormir tranquilles; parce qu'un jour nous perdrons tout, non pas parce que nous sommes faibles et que nous avons été écrasés par plus fort que nous, mais parce que nous avons été lâches et que nous n'avons rien fait. La guerre, c'est la guerre. Et la guerre va te faire prendre conscience des plus terribles vérités. Mais la pire de toutes, la plus insupportable, c'est que nous sommes seuls. Et nous serons toujours seuls. Les plus seuls des seuls. Seuls à jamais. Et il faudra vivre quand même."

vendredi 19 janvier 2018

La Ligne Verte - Stephen King

"Ça c'est passé en 1932, quand le pénitencier de l'Etat se trouvait encore à Cold Mountain. Naturellement, la chaise électrique était là. Ils en blaguaient, de la chaise, les détenus, mais comme on blague des choses qui font peur et auxquelles on ne peut échapper. Ils la surnommaient Miss Cent Mille Volts, la Veuve Courante, la Rôtisseuse." Dans le bloc des condamnés à mort, au bout d'un long couloir que les prisonniers appellent la ligne verte, la chaise électrique attend John Caffey. Le meurtrier des petites jumelles Detterick, jadis découvert en larmes devant leurs cadavres ensanglantés. Paul Edgecombe, le gardien-chef, l'accueille comme les autres, sans état d'âme. Pourtant, quelque chose se trame... L'air est étouffant, la tension à son comble. Un rouage va lâcher mais pourquoi ? Les provocations sadiques d'un maton dérangé, la présence d'une souris un peu trop curieuse, l'arrivée d'un autre condamné ?

Aux frontières du roman noir et du fantastique, ce récit est avant tout une brillante réflexion sur l'exécution capitale.


MON AVIS
Premier Stephen King de ma vie de lectrice, mais aussi premier avis mitigé sur une oeuvre de cet auteur... 

Connu mondialement, aussi bien dans le domaine de la littérature que dans le domaine du cinéma, La Ligne Verte (où The Green Mile) était pour moi, le baptême du feu. Un baptême qui s'appelle Stephen King.

Je pense que ma déception vient principalement de ma méprise sur le thème du roman. Je m'attendais à une histoire autour de la peine de mort, des divers acteurs et des participants etc. Et comme l'annonçait la quatrième de couverture "une brillante réflexion sur l'exécution capitale". Un peu à la sauce du Dernière jour d'un condamné de Victor Hugo. Or pas du tout... 

Effectivement, le roman amène le lecteur à réfléchir sur la peine de mort et ses conséquences, mais sans que cela ne soit très développé. A mon sens, cela n'était pas le but premier de l'intrigue et le court roman de Victor Hugo est en ce sens bien plus fort et bien plus poignant.

Par contre, j'ai pu découvrir, j'imagine, le commencement des frontières de l'univers King. Un monde rempli de mysticisme, un avant goût de spiritisme, une pointe d'étrange pouvoir, de petites touches de magie... à la limite entre réalité et surnaturel.

Au début, je ne savais pas comment prendre cet aspect de l'histoire... Et puis finalement j'ai fini par accepter qu'on ne pouvait pas tout expliquer, et j'en ai pris mon parti.

Bien qu'il m'ai fallu presque 2 semaines pour lire ces quelques 500 pages, j'ai été réellement intriguée par l'aura autour des personnages, le mystère les entourant et les réponses inattendues aux questions qu'on ne se posait pas. Le roman tient en haleine avec une plume juste et fine, qui fait mouche. Particulièrement sur la fin, où Stephen King retranscrit avec justesse des moments violents et poignants.

Les thèmes des préjugés, en temps de ségrégation aux Etats-Unis, des erreurs, des mauvais jugements, et les revers de bâton sont également abordés de manières simple et efficace.

Par contre, je ne trouve pas le narrateur si attachant. Je me suis retrouvée face à une personne qui s'écoute beaucoup parler (dans ce cas-ci qui lire et écrire). Je n'ai rien ressenti de particulier tandis que mes émotions envers les différents détenus et condamnés étaient beaucoup plus forts. En bien comme en mal.

Sincèrement, je suis intriguée par l'univers de Stephen King, bien que je n'ai pas lu ce à quoi je m'attendais. Je me plongerais bien dans certains autres de ces romans. Qu'en avez-vous pensé ? Que me conseillez-vous ?


Le + : la petite touche de paranormal et les détenus
Le - : le thème principal trompeur et un narrateur peu intéressant



MA NOTE

lundi 15 janvier 2018

Le Cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates - Annie Barrows & Mary Ann Shaffer


Janvier 1946. Londres se relève douloureusement des drames de la Seconde Guerre mondiale et Juliet, jeune écrivaine anglaise, est à la recherche du sujet de son prochain roman. Comment pourrait-elle imaginer que la lettre d'un inconnu, un natif de l'île de Guernesey, va le lui fournir ? Au fil de ses échanges avec son nouveau correspondant, Juliet pénètre son monde et celui de ses amis - un monde insoupçonné, délicieusement excentrique. Celui d'un club de lecture créé pendant la guerre pour échapper aux foudres d'une patrouille allemande un soir où, bravant le couvre-feu, ses membres venaient de déguster un cochon grillé (et une tourte aux épluchures de patates...) délices bien évidemment strictement prohibés par l'occupant. (...) Peu à peu, elle élargit sa correspondance avec plusieurs membres du Cercle et même d'autres habitants de Guernesey , découvrant l'histoire de l'île, les goûts (littéraires et autres) de chacun, l'impact de l'Occupation allemande sur leurs vies... (...) Ce qu'elle va trouver là-bas changera sa vie à jamais.


MON AVIS
J'avais hâte de découvrir ce roman dont j'avais entendu beaucoup de bien. Mais surtout le format épistolaire m'intriguait fortement. Créer des personnages en relief avec des personnalités et des psychologies marquées et marquantes n'est pas chose aisée. Ce besoin se ressent d'autant plus dans un roman épistolaire que chaque lettre doit refléter cette personnalité qu'on ne fait finalement qu'effleurer dans un schéma de roman plus classique.

Alors, pari tenu ?

Je dis oui. J'achète même ! J'ai passé un agréable moment en compagnie de Juliet, Sidney, Isola, Dawsey, Kit et tous les autres membres ou non membres du Cercle littéraire. Des personnalités exubérantes, attachantes et charmantes. Une famille que l'on se fait un plaisir de retrouver et d'en prendre des nouvelles.

Ici, on est projeté dans une Angleterre d'après-guerre fortement touchée par les bombardements de l'Allemagne nazie et des années de privation. Le roman se partage ainsi entre Londres, où l'on suit Juliet, et l'île de Guernesey, île anglo-normande, où l'on vit le quotidien de ses habitants. Plus fort encore, l'immersion de leur survie sous l'occupation, se fait au travers, et grâce, aux relations qui se nouent. 

C'est la principale force de ce roman épistolaire: des relations poignantes qui se créent au travers de la puissance de l'écriture. Les détails de la vie quotidienne, les anecdotes partagées au fil des pages... forment la proximité avec son lecteur. 

Ces petits éléments charmants font que l'on s'attache à l'ensemble des personnages: les rencontres d'une lettre comme les correspondants récurrents, en passant par les personnages frustrants et surtout les absents. Ces absents qui n'écrivent pas mais qui sont tout de même présents tout au long du roman et qui imprègnent les échanges d'un goût doux-amer.

Le roman dégage une douceur particulière et familière. Une sensation agréable assaille le lecteur. C'est comme se poser au coin du feu, enfiler ses chaussettes-chaussons, se pelotonner sous un plaid et retrouver son livre doudou. Toutes ses sensations en un seul livre. Et puis tombée amoureuse d'une île... je pense ne pas pouvoir en dire plus sur la force de ce roman.

Le format est lui aussi très bien pensé. Un chapitre correspond à une lettre parfois plusieurs pages, parfois une page voire une ligne. C'est cours et efficace. On veut en savoir plus à la fin de chacune des lettres échangées.

Parfois prévisible, souvent surprenant et doux, ce roman est une agréable découverte pour moi. Je pensais apprécier mais pas à ce point. C'était sucré et doux, amer et épicé. Une histoire doudou pour des soirées chouchou.


Le + : Le format épistolaire captivant avec lequel on ne s'ennuie pas et des personnages poignants
Le - : Peut-être qu'à un moment il y eu trop de personnages entraînant une similitude de personnalité


MA NOTE

mardi 9 janvier 2018

La Fille du Train - Paula Hawkins



Depuis la banlieue où elle habite, Rachel prend le train deux fois par jour pour aller à Londres. Le 8 h 04 le matin, le 17 h 56 l’après-midi. Chaque jour elle est assise à la même place et chaque jour elle observe, lors d’un arrêt, une jolie maison en contrebas de la voie ferrée. Cette maison, elle la connaît par cœur, elle a même donné un nom à ses occupants qu’elle voit derrière la vitre. Pour elle, ils sont Jason et Jess. Un couple qu’elle imagine parfait, heureux, comme Rachel a pu l’être par le passé avec son mari, avant qu’il ne la trompe, avant qu’il ne la quitte. Rien d’exceptionnel, non, juste un couple qui s’aime. Jusqu’à ce matin où Rachel voit un autre homme que Jason à la fenêtre. Que se passe-t-il ? Jess tromperait-elle son mari ? Rachel, bouleversée de voir ainsi son couple modèle risquer de se désintégrer comme le sien, décide d’en savoir plus sur Jess et Jason. Quelques jours plus tard, c’est avec stupeur qu’elle découvre la photo de Jess à la une des journaux. La jeune femme, de son vrai nom Megan Hipwell, a mystérieusement disparu…





MON AVIS
La 4ème de couverture m'a fortement intriguée. Le roman s'annonçait comme un polar de bon calibre, tortueux à souhait. Ici, on parle de Mme Lambda qui assiste à un fait divers comme un autre. Une Mme Lambda pas si lambda que ça et un fait divers plus si divers quand on creuse la surface.

L'idée est bonne. Paula Hawkins utilise un phénomène que tout le monde fait un jour ou l'autre: étudier la vie de son voisin, essayer de découvrir les secrets de la vie des gens proches de nous et oser croire qu'on peut les percer à jour juste en les observant.

La narratrice de l'histoire, Rachel, est une femme intéressante de part son caractère, sa situation et son passé. Avoir son insight, son ressenti c'est comme regarder à travers un miroir déformant, comment savoir ce qui est vrai de ce qui ne l'est pas, comment distinguer le mensonge de la vérité ? Et Paula Hawkins joue parfaitement sur ce tableau entre illusion et faits réels.

A travers l'histoire de Rachel, c'est aussi un thème que j'ai encore rarement rencontré du point de vue d'un personnage principal: l'alcoolisme et les conséquences que cela peut engendrer dans la vie quotidienne. Bien sûr on peut tous imaginer ce qu'elles sont. Mais cela reste original de le voir aborder sous cet angle afin d'étudier les réactions de l'entourage et de la personne concernée (qui tente d'agir pro-activement sur son état). C'est également le thème de la culpabilité de Rachel qui entre en jeu dans ce roman, ce que j'ai trouvé assez novateur.

Finalement, ici, on suit les points de vue des trois protagonistes féminins: l'ex-femme alcoolique, la nouvelle femme jeune mère au foyer et la disparue. L'auteure construit son roman comme un journal intime de ces femmes, si différentes dont la trame de leur vie vont se rejoindre de la pire des manières.

Les informations tombent au compte goutte et c'est à nous de reconstituer le puzzle. De démêler le vrai du faux. Le roman est bien construit et mène bien son lectorat. C'est un thriller intrigant et emmenant. De ce point de vue là, le succès que le roman a gagné est mérité.

J'aurais également aimé que l'auteure appuie un peu plus sur le côté psychologique de ses personnages. Si c'est le cas avec "Jess", la femme disparue, il m'a manqué certains aspects pour les autres personnages du roman. J'aurais aimé connaître plus en profondeur leurs motivations, notamment au fin mot de l'histoire.

Je dois également dire que j'ai pu deviner la fin dès le début de la deuxième moitié de roman et de ce fait, je m'attendais à une révélation plus grandiose. La fin reste pourtant en adéquation avec le côté "vie quotidienne" et fait divers du roman.

C'est un bon thriller qui mérite d'être lu, mais qui ne m'a pas emportée comme je l'aurais espéré.


Le + : Le thème de l'alcoolisme qui est traité, un point de départ présenté comme "fait divers"
Le - : Le manque de psychologie développée pour certains personnages.


MA NOTE


mardi 2 janvier 2018

Le rapport de Brodeck - Philippe Claudel



Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il faut que tout le monde le sache. Moi je n’ai rien fait, et lorsque j’ai su ce qui venait de se passer, j’aurais aimé ne jamais en parler, ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce qu’elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer. Mais les autres m’ont forcé : « Toi, tu sais écrire, m’ont-ils dit, tu as fait des études. » J’ai répondu que c’étaient de toutes petites études, des études même pas terminées d’ailleurs, et qui ne m’ont pas laissé un grand souvenir. Ils n’ont rien voulu savoir : « Tu sais écrire, tu sais les mots, et comment on les utilise, et comment aussi ils peuvent dire les choses. Ça suffira. Nous on ne sait pas faire cela. On s'embrouillerait, mais toi, tu diras, et alors ils te croiront.»




MON AVIS
Philippe Claudel dépeint ici, l’horreur de la guerre dans toute sa splendeur. Celle qui écrase une nation, qui détruise un peuple, en commençant par ses hommes.

Primé en 2007, par le prix Goncourt des lycéens, Le rapport de Brodeck, est un roman bouleversant, qui vous serre le cœur, et fait montée la bile aux bords des lèvres.

On y découvre la Peur. La Peur et ses méfaits. La Peur et ses lieutenants: rejet, haine, violence...

Brodeck, protagoniste principal, et voix de cette histoire raconte au lecteur la vie qu’il a vécu. Une enfance difficile tâchée par une première guerre, une vie de jeune adulte blessée par les souffrances d’une seconde guerre et un retour à une réalité difficile. 

Ces guerres loin d’être les événements primordiaux de ce roman, ne sont que des excuses, des prétextes, derrière lesquelles se cachent les hommes pour justifier leurs actes. 

Un nouveau présent, qui peut-être, révèle uniquement l'horrible vérité de la nature de l'Homme.

Brodeck écrit cette histoire, comme il raconterait la vie. C’est un récit désordonné et dans le désordre… un souvenir en rappelant un autre, entraînant son lecteur vers les eaux troubles des motivations humaines.

J’ai été touchée par la poésie des mots de Brodeck, par la douceur de son regard sur le monde, la tendresse qu'il montre envers les membres de sa famille. Sa vision, parfois complexe et brouillée, nous entraîne sur la route de son histoire et de celle de son village. Un village de campagne tellement reculé qu’au début j’ai eu l’impression de retourner bien loin dans les âges.

On suit l’histoire comme on pourrait suivre un roman policier. De nombreuses questions se posent, dont les réponses restent floues. On attend et on découvre la vérité. Une vérité toute relative et parfaitement subjective. La réalité semble parfois se mélanger aux fantasmes, aux désirs et aux souvenirs. Rien n'est réellement situé ou affirmé, tout est insinué. Pourtant, certains éléments semblent clairs...

Ce roman est doux et violent. Terrible surtout. Après l’avoir fini, il est facile de se rendre compte du pouvoir que l’homme possède entre ses mains. De ce qu’il est capable de faire lorsque la peur et la rage prennent le dessus. C'est une lecture qui invite à la réflexion tout au long du roman et bien après.


C’est un roman que je conseille pour toute personne. Les émotions sont dures et fortes. La fiction pourrait facilement devenir réalité. A pu être réalité lors d'un sombre passé. Et cette réalité est bien effrayante. Philippe Claudel confronte son lecteur face aux dures réalités pour mieux comprendre et peut-être, ne pas recommencer.


Le + : Un roman sombre qui se lie comme on pourrait lire une autobiographie: parsemé de souvenirs...
Le - : /


MA NOTE