Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il faut que tout le monde le sache. Moi je n’ai rien fait, et lorsque j’ai su ce qui venait de se passer, j’aurais aimé ne jamais en parler, ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce qu’elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer. Mais les autres m’ont forcé : « Toi, tu sais écrire, m’ont-ils dit, tu as fait des études. » J’ai répondu que c’étaient de toutes petites études, des études même pas terminées d’ailleurs, et qui ne m’ont pas laissé un grand souvenir. Ils n’ont rien voulu savoir : « Tu sais écrire, tu sais les mots, et comment on les utilise, et comment aussi ils peuvent dire les choses. Ça suffira. Nous on ne sait pas faire cela. On s'embrouillerait, mais toi, tu diras, et alors ils te croiront.»
MON AVIS
Philippe Claudel dépeint ici, l’horreur de la guerre dans
toute sa splendeur. Celle qui écrase une nation, qui détruise un peuple, en commençant par ses
hommes.
Primé en 2007, par le prix Goncourt des lycéens, Le rapport de Brodeck, est un roman bouleversant, qui vous serre le cœur, et fait montée la bile aux bords des lèvres.
On y découvre la Peur. La Peur et ses méfaits. La Peur et ses lieutenants: rejet, haine, violence...
Brodeck, protagoniste principal, et voix de cette histoire raconte au lecteur la vie qu’il a vécu. Une enfance difficile tâchée par une
première guerre, une vie de jeune adulte blessée par les souffrances d’une
seconde guerre et un retour à une réalité difficile.
Ces guerres loin d’être les événements primordiaux
de ce roman, ne sont que des excuses, des prétextes, derrière lesquelles se cachent les hommes pour
justifier leurs actes.
Un nouveau présent, qui peut-être, révèle uniquement l'horrible vérité de la nature de l'Homme.
Brodeck écrit cette histoire, comme il raconterait la
vie. C’est un récit désordonné et dans le désordre… un souvenir en rappelant un
autre, entraînant son lecteur vers les eaux troubles des motivations humaines.
J’ai été touchée par la poésie des mots de Brodeck, par la
douceur de son regard sur le monde, la tendresse qu'il montre envers les membres de sa
famille. Sa vision, parfois complexe et brouillée, nous entraîne sur la route
de son histoire et de celle de son village. Un village de campagne
tellement reculé qu’au début j’ai eu l’impression de retourner bien loin dans
les âges.
On suit l’histoire comme on pourrait suivre un roman policier. De
nombreuses questions se posent, dont les réponses restent floues. On attend et
on découvre la vérité. Une vérité toute relative et parfaitement subjective. La
réalité semble parfois se mélanger aux fantasmes, aux désirs et aux souvenirs. Rien n'est réellement situé ou affirmé, tout est insinué. Pourtant, certains éléments semblent clairs...
Ce roman est doux et violent. Terrible surtout. Après
l’avoir fini, il est facile de se rendre compte du pouvoir que l’homme possède entre
ses mains. De ce qu’il est capable de faire lorsque la peur et la rage
prennent le dessus. C'est une lecture qui invite à la réflexion tout au long du roman et bien après.
C’est un roman que je conseille pour toute personne. Les
émotions sont dures et fortes. La fiction pourrait facilement devenir réalité. A pu être réalité lors d'un sombre passé. Et
cette réalité est bien effrayante. Philippe Claudel confronte son lecteur face aux dures réalités pour mieux comprendre et peut-être, ne pas recommencer.
Le + : Un roman sombre qui se lie comme on pourrait lire une autobiographie: parsemé de souvenirs...
Le - : /
MA NOTE
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